Certes, les remote jobs permettent un meilleur équilibre vie professionnelle/vie privée. Mais en éloignant les femmes de l’entreprise, ne vont-ils pas contribuer à renforcer les inégalités dont elles sont déjà victimes dans la sphère du travail ?
Les remote jobs sont-ils, avant tout une affaire de femmes ? En tout cas, il semble bien qu’elles en sont plus demandeuses, comme tend à le montrer une enquête (2021) du site spécialisé Flexjobs. Selon elle, 68 % des femmes préféreraient travailler à distance une fois la pandémie passée, contre 57 % des hommes. Mieux, elles sont 80 % à classer le travail à distance comme l’un des principaux avantages que peut offrir un emploi, contre seulement 69 % des hommes répondants.
Une étude plus récente (avril 2022), dont le site Virtual Vocations est à l’origine, s’est également intéressée aux remote jobs. Une majorité de femmes (67,75 %) y a répondu, contre 29,96 % d’hommes et 3 % qui ont préféré ne pas se définir. A 70 %, les répondants (toutes catégories confondues) ont plébiscité une organisation en full remote, 15, 43 % favorisant une forme de remote work dominant mais partiel et seulement 8,76 % affirmant leur préférence pour un modèle hybride avec une présence conséquente sur site.
Qu’il soit partiel ou total, le remote semble donc bel et bien réclamé par les femmes. Un choix qui révèle également les contraintes auxquelles elles continuent d’être confrontées. En permettant de combiner plus facilement vie professionnelle et vie privée, le travail en remote pourrait représenter une « respiration » pour ces dernières alors qu’elles pâtissent toujours de la répartition inégale hommes/femmes en ce qui concerne les tâches domestiques et parentales. Une situation que des années de lutte féministe n’a toujours pas permis de corriger.
Un risque : accentuer les inégalités
Mais au-delà d’un effet d’ordre organisationnel qui permettrait aux femmes de mieux gérer la tension entre vie privée et vie professionnelle, les remote jobs ne vont-ils pas, dans le même temps, renforcer les causes profondes qui alimentent les discriminations à leur égard ?
Intéressons-nous au modèle hybride qui, dans un futur proche, semble être celui qui a le plus de chances de s’imposer. Ce dernier mêle présentiel et distanciel à des degrés divers.
Dans une telle configuration, les salariés travaillant très majoritairement à distance ont une grande crainte : celle d’être les victimes d’un biais de proximité de la part des managers favorisant les collaborateurs davantage (ou totalement) présents sur site.
Ainsi, environ la moitié des 5 000 travailleurs de l'indice des talents de la plateforme Beamery estimait récemment qu'avoir considérablement réduit le temps passé avec leurs supérieurs avait entravé leur trajectoire de carrière.
La responsabilité des managers
On comprend donc que la question se pose avec encore plus d’acuité pour les femmes qui souffrent déjà, dans les modes traditionnels d’organisation du travail, d’un ensemble de discriminations. Elles sont matérialisées, par exemple, par les différences de salaire à poste égal ou bien par une moindre présence dans les postes à responsabilité en entreprises. Si les femmes s’éloignent des centres vitaux des organisations, cela ne va-t-il pas contribuer à faire perdurer, voire renforcer, ces inégalités ?
Ce sujet doit être pleinement intégré par les directions générales et les managers. Il s’agit, plus que jamais, de standardiser des méthodes d’évaluation de la performance afin qu’elle soit mesurée de la manière la plus objective possible.
A l’heure où les remote jobs sont devenus incontournables, ces derniers doivent impérativement contribuer à donner naissance à un modèle win-win. Pour tous. Et pour toutes.